Initialement, le concept était parfaitement sérieux : ne pas dépendre d’un autre État pour le numérique, au sens large. On parlait aussi bien des infrastructures que des logiciels. Quand on voit notre dépendance à certains outils, il est vrai que la question se pose. Par ailleurs, vouloir rompre une dépendance est toujours bénéfique à l’innovation et à l’économie.
Sauf que ce concept, porté par des Tech qui savaient de quoi ils parlaient, a été récupéré par des politiques et là, c’est le drame absolu.
Alors qu'il défendait mordicus l'open source comme valeur cardinale pour s'imposer face aux géants américains, le champion français de l'intelligence artificielle, Mistral AI, a développé son plus puissant modèle de langage de manière fermée, et a conclu un partenariat pour l'heure exclusif avec Microsoft pour sa distribution, laissant même l'Américain entrer symboliquement à son capital. Si ce virage stratégique aux allures de séisme fait sens d'un point de vue économique et bénéficie du soutien de la France, il rend furieux à Bruxelles et parmi les défenseurs de l'IA européenne. Par ricochet, l'entrée de Mistral, comme OpenAI avant lui, dans le giron du géant Microsoft, est une claque pour la souveraineté numérique européenne, et acte la position déjà dominante des Américains dans la course à l'intelligence artificielle.