Stratégie délibérée ou simple aveuglement ?
Dans les deux cas, ça interroge grandement.
On peut avancer deux explications sous forme de conjectures à cet « oubli » de millions de ménages. La première est que l’imaginaire social du gouvernement est biaisé au point qu’il est capable d’envisager les difficultés économiques des entreprises et de leurs dirigeants, d’encourager à la suspension du paiement des loyers, mais seulement pour les entreprises ; de demander (poliment) aux actionnaires une « modération dans le versement des dividendes (sic) » ; mais que, préoccupé par la crise économique et l’urgence sanitaire, il ne se rend pas spontanément compte de l’exposition des ménages modestes à la crise présente.
Pour gérer la crise et en sortir, le gouvernement organiserait dès aujourd’hui un « choc d’offre », permettant un ajustement des salaires à la baisseLa seconde explication, encore plus inquiétante, est suggérée par les impressionnantes mesures de dérégulation du droit du travail contenues dans le plan d’urgence sanitaire. Pour gérer la crise et en sortir, le gouvernement organiserait dès aujourd’hui un « choc d’offre », permettant un ajustement des salaires à la baisse.
Si tel est bien le cas, on peut penser que ne pas relever les minima et étendre la couverture chômage n’est pas une omission : faire rouler les livreurs à vélo coûte que coûte n’est pas un oubli, mais une stratégie. Elle permet de mettre à disposition des entreprises et des ménages aisés une main-d’œuvre bon marché, pendant le confinement, et en sortie de crise. Cette stratégie n’ignore pas l’absence de protection sociale et au travail d’une partie de la population, elle en a besoin.